C'EST ARRIVÉ EN --- MARS 1994
Au soir du samedi 12 mars 1994, à la fin de la
première journée des championnats d’Europe en salle, disputés au Palais
Omnisports de Paris Bercy, le bilan de l’équipe de France est assez
faible, malgré l’avantage d’évoluer à domicile. Seulement deux médailles
sont inscrites au tableau tricolore et le forfait de dernière minute de
Marie-José Pérec, laissant libre son couloir en séries du 200 m, est un
véritable coup de massue. Mais les troupes du président Jean Poczobut
et de son DTN François Juillard, pourtant déjà privés de Diagana,
Trouabal ou Camara, vont relever la tête le lendemain et offrir un feu
d’artifice de neuf autres récompenses !
Parmi celles-ci, un sauteur
en hauteur de vingt-sept ans va démontrer que les espoirs entrevus dès
1987 avec un premier titre de champion de France et en 1989 avec le
record de France en salle porté à 2m27, n’étaient pas un feu de paille
et qu’il suffisait que les conditions soient enfin réunies pour que son
talent explose au grand jour, sous la férule de Claude Prouff. On vit
d’ailleurs le changement apparaître chez le géant de Locminé dès l’été
1993 et Jean-Charles Gicquel remporta alors les Jeux
Méditerranéens et franchit 2m30 à l’occasion de la Coupe d’Europe, barre
qu’il n’avait atteint qu’une seule fois auparavant en 1990. Son début
d’année 1994 va être de la même veine et en intégrant le relevé circuit
allemand des meetings, il porte le record de France en salle, d’abord à 2
m 28 et 2m31 le 19 février à Francfort, puis à 2m32 le 4 mars à Berlin.
A
Berçy, sa confiance est au maximum il figure parmi les favoris d’un
concours d’une grande densité. Il débute à 2m20, doit s’y reprendre à
deux fois pour passer 2m26 et ose l’impasse à 2m29. S’il assure 2m31 au
premier essai, le concours est loin d’être terminé car c’est aussi le
cas de l’Allemand Hendrik Beyer, du Norvégien Steinar Hoen, tandis que
le Russe Leonid Pumalaynen passe au deuxième essai et que l’autre
Norvégien Hakon Sarblom, après un échec, a gardé deux tentatives pour la
barre suivante. Le Britannique Dalton Grant fait de même pour un seul
saut. Les médailles vont se jouer à 2 m 33, Pulaymanen, Hoen et Sarblom
en restent là, Grant réussit son premier coup de poker sur son unique
essai, retrouvant Gicquel qui améliore au passage le record de France en
salle. Beyer les rejoint avec son dernier saut. Le podium est alors
connu mais l’ordre reste à déterminer. Beyer ne fera pas mieux et
décroche donc le bronze. Jean-Charles survolté par l’ambiance passe au
deuxième essai 2m35 et pense avoir fait le plus dur pour l’or, mais ce
diable de Grant qui se trouve après lui sur la liste du concours retente
un nouveau pari en gardant deux sauts à 2m37. Le deuxième est le bon ce
qui amènera Gicquel a tenté une fois en vain 2m39, et à devoir se
contenter de l’argent.
Au moins de
juillet, il franchira 2m33 à Eberstadt, prenant le record de France
plein air à Franck Verzy mais ses 2m35 restent aujourd’hui encore la
plus haute barre atteinte par un Français, la non-rétroactivité du
changement de réglementation en 2000 ayant permis à Mickael Hanany
d’effacer avec 2m34 le saut d’Eberstadt de la liste des records absolus.
Jean-Charles poursuivra encore sa carrière jusqu’en 2000, où il sera
encore troisième aux championnats de France, en plafonnant à 2m25 mais
ses enfants Clément, champion de France espoir en 2013 et Solène,
championne Elite en 2020 après quatre titres chez les jeunes,
reprendront le flambeau (Crédit photo : Jean-Pierre Durand – Revue FFA).
Rédacteur Luc Vollard